vendredi 27 avril 2012

Les mères porteuses, nouvelle sorte de tourisme médical

 Si vous ne l'autorisez pas chez nous, on le fera ailleurs. Quitte à aller loin, très loin.
Un nombre croissant de couples français se rend en Inde ces dernières années pour mettre au monde "leur" enfant par mère porteuse, contournant ainsi la stricte interdiction de cette procédure de procréation assistée qui sévit en France. La Cour de Cassation a en effet banni la "gestation par autrui" en 1991, ce qui a été confirmé par l'inscription dans le code civil de la notion de "non-patrimonialité du corps humain".

Les couples français qui viennent en Inde se posent la question différemment : ils cherchent  désespérément à avoir un enfant, après des tentatives répétées et infructueuses de fécondations in vitro. Cette procédure de "gestation par autrui" permet de remédier à cela : on utilise leurs gamètes, ou en tout cas celles de l'une des personnes si l'autre est stérile, et leur enfant portera donc cette empreinte génétique, à la différence d'un bébé adopté. Et cet acte va en général plus vite qu'une démarche d'adoption. 
Il y a aussi, signe du temps, de plus en plus de couples homosexuels, qui contournent ainsi avec distance les tabous et interdits de nos sociétés.


En Inde, le problème est vu par l'autre bout : c'est un commerce avant d'être un problème éthique (voir ce cas d'une Canadienne qui a payé deux mères porteuses pour arriver à ses fins). Les cliniques "naissent" en nombre depuis dix ans, mais aucune loi n'a encore été votée pour réguler cette nouvelle forme de tourisme médical. Un projet de loi est en souffrance dans les couloirs du ministère de la Santé depuis 2010, et ne semble pas vouloir en sortir. "Business as usual" : dans un pays où plus d'un tiers de la population vit avec moins d'un dollar par jour pour vivre, ce nouveau commerce des ventres est une bonne nouvelle : une femme peut être payée environ 7000 euros en neuf mois de gestation assistée. Soit l'équivalent de dix ans de salaire, si elle continuait à travailler comme domestique à la campagne. 

Le problème, cependant, ne manquera pas de surgir, quand des cliniques sans scrupules passeront par des femmes trop faibles pour avoir un enfant, et finiront par les abandonner dans la souffrance. Le projet de loi prévoit d'offrir une assurance-vie à ces mères  porteuses, ce qui serait bien le moindre des cadeaux pour celles qui offrent la vie à ceux qui ne peuvent pas le faire.

En attendant, les couples français qui vont au bout de cette procédure rencontrent toutes les difficultés possibles pour pouvoir rentrer avec leur nouveau-né : les autorités consulaires refusent en général de lui délivrer un laissez-passer. Quand ils y arrivent finalement, ce sont les tribunaux de métropole qui rejettent les demandes d'inscriptions à l'état civil. Une décision de la cour d'appel de Rennes, cependant, semble indiquer une première, et légère, ouverture législative sur le sujet.


Pour aller plus loin, voici ma chronique sur ce sujet, sur France Info.

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