lundi 5 décembre 2011

Avortements sélectifs : Les filles restent indésirables

"Le garçon est pour nous la "lumière du foyer", il faut donc un homme dans une famille... ces avortements, cela était juste pour nous un moyen d'y arriver". 
C'est avec ces mots simples que Supriya explique pourquoi elle a mené cinq avortements consécutifs en moins de dix ans, dont le dhttp://www.thehindu.com/news/national/article2045372.eceernier a été réalisé à 5 mois de grossesse. Cinq refus d'avoir une fille, malvenue dans une famille qui en comptait déjà trois. Cinq avortements sélectifs qui se mêlent aux 400 000 réalisés tous les ans en Inde, et qui pèsent dans le déséquilibre social à venir en Inde. 

Car l'Inde se modernise, l'Inde grandit, croît, l'Inde "brille" pour certains. Mais "les progrès économiques n'ont pas été accompagnés par des avancées sociales", déplore Rahul Singh, un journaliste spécialisé des questions de démographie. Les familles s'enrichissent, mais les vieilles traditions demeurent: la dot, en particulier, continue à transformer les filles en un fardeau perpétuel. Supriya et son mari ont par exemple dû débourser l'équivalent de 12 000 euros pour marier leur fille aînée, la moitié pour la cérémonie grandiose, et l'autre pour la dot, sous forme de bijoux en or et de costumes somptueux. 

Puis les règles traditionnelles en général, sont machistes : les filles restent considérés, surtout dans les Etats patriarcaux du Nord de l'Inde, comme des poids pour la famille. Et comme un contre-investissement, car elle partira vivre dans la famille de l'époux. Les parents ne pourraient alors que s'en remettre à un "bon garçon, fiable et vaillant", pour perpétuer le patronyme et s'occuper des parents qui vieillissent. C'est en tout cas la croyance populaire, car des experts affirment que les filles, même si elles partent du foyer, sont souvent présentes, parfois plus que les hommes, pour s'occuper des problèmes familiaux. Beaucoup de rites hindous, comme la crémation funéraire des parents, ne peuvent être réalisés par des filles.

Ces avortements sélectifs ont commencé avec la légalisation de l'avortement en 1971. En 1994, le gouvernement a interdit toute identification du sexe du bébé par échographie, mais rien n'y fait. La situation empire : selon le dernier recensement national, l'Inde ne compte aujourd'hui que 914 filles âgées de moins de 6 ans contre 1000 garçons. Le pire ratio après la Chine.

On voit déjà, malheureusement, les effets désastreux de cette sélection artificielle : dans certains Etats du Nord, les hommes attendent des années avant de pouvoir trouver une femme, et vont maintenant jusqu'à les chercher, voire les acheter dans ceux du sud, comme le Kerala, où cette pratique est beaucoup moins courante. Des cas de polyandrie ont été également recensés, deux frères partageant une même épouse... 

Venez écouter le témoignage de Supriya, qui détaille ce qui l'a poussé à mettre sa vie en danger pour avoir un garçon, ainsi que les différents efforts du gouvernement pour freiner ces avortements sélectifs, dans ce Grand reportage diffusé sur RFI. 


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